Temps de lecture
2 min
Statut de la proposition
Publiée
Date de création
14/03/2021

Instaurer des Agences de l’alimentation sur l’ensemble du territoire national

Pour structurer la gouvernance alimentaire française

Pourquoi ?

Le droit à l’alimentation n’étant pas considéré comme une mission régalienne, la gouvernance de l’alimentation est disparate. Aujourd’hui, il n’existe pas de compétence spécifique dédiée à l’alimentation en France. Le Programme National de l’Alimentation (PNA) est la politique publique uniformisant l’action publique en matière d’alimentation1. Son application territoriale est pilotée par les Directions Régionales de l’Alimentation, l’Agriculture et la Forêt (DRAAF). Leurs priorités actuelles sont le déploiement des Projets Alimentaires Territoriaux (PAT), et le respect de la LOI n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable. Les Chambres d’agriculture, quant à elles, représentent les acteurs agricoles privés et assurent leur développement en les conseillant. Les PAT sont des instruments de gouvernance facultatifs, aux critères d’application souples et dont la valeur réside dans leur nature ascendante et participative. Leurs sources de financements sont faibles, en particulier pour leur opérationnalisation, car dépendantes d’une volonté politique inégale d’une collectivité à une autre, et de l’appel à projet annuel du PNA. Il n’existe donc pas de budget dédié à l’alimentation réparti équitablement sur le territoire. Il n’existe pas non plus de structure de gouvernance nationale, ni d’instance de pilotage des PAT. Enfin, les délimitations administratives des DRAAF et des Chambres ne coïncident pas avec les bassins de production et de consommation2. Le caractère facultatif des PAT empêche leur systématisation. La crise sanitaire actuelle démontre les limites d’un système pensé en silos ; les compétences administratives étant morcelées et les enjeux par conséquent souvent illisibles.

La création d’un établissement public administratif alimentaire, pensé sur le modèle des agences de l’eau et fonctionnant comme un conseil de gouvernance et de pilotage, permettrait de traiter l’enjeu alimentaire de manière systémique, en cohérence avec les réalités de terrain. Cela introduirait une conception de l’alimentation, non plus comme simple marchandise, mais comme ressource naturelle, et le droit à l’alimentation durable comme un service public. Leur existence limiterait le traitement morcelé de la question alimentaire et concrétiserait la notion de démocratie alimentaire3.

Comment ?

Déterminer la couverture géographique des agences en fonction des bassins de production et de consommation.

Octroyer la compétence alimentation aux agences, incluant la mise en cohérence de la production et de la consommation locale avec les objectifs socio-environnementaux propres à leur bassin.

 • Mettre à disposition de ces agences un budget indépendant, sous tutelle des ministères de l’Agriculture et de l’alimentation et de la Transition écologique et solidaire. Ce budget serait alimenté par des redevances dont la nature devra être étudiée ainsi que par les aides françaises et européennes dont il simplifierait la répartition. Ce budget servirait notamment à octroyer un  financement systématique aux PAT (dont les qualités sont réitérées), en abolissant le système de financement par appels à projets.

 • Confier à ces agences la coordination et le pilotage des PAT à l’échelle territoriale, en assurant l’instauration d’instances de concertation et de co-construction participatives couvrant l’ensemble de leur territoire (à l’instar des SDAGE et SAGE des agences de l’eau)4.

 • Charger ces agences de la collecte et de la distribution des fonds dédiés à la mise en place d’une sécurité sociale de l’alimentation (cf. Proposition « Sécurité Sociale de l’Alimentation ») dont le déploiement systémique se substituerait au système d’aide alimentaire actuelle.

 • Remplacer les DRAAF par ces agences (ou leur faire endosser les rôles susmentionnés) afin de ne pas alourdir le mille-feuille administratif français.

Sources

(1) Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. (Octobre 2019). Programme National pour l’Alimentation (PNA) : Un nouvel appel à projets pour 2019-2020 est ouvert du 30 septembre au 25 novembre 2019. Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.
URL:https://agriculture.gouv.fr/programme-national-pour-lalimentation-un-nouvel-appel-projets-pour-2019-2020

(2) Sarrazin, F. (2016). Présentation : Dans La construction sociale des bassins de production agricole. Nature et société, 11–12. URL:https://www.cairn.info/la-construction-sociale-des-bassins-de-production–9782759225354-page-11.html

(3) Paturel, D. (Février 2019a). Vous avez dit démocratie alimentaire ? Sesame.
URL:https://revue-sesame-inrae.fr/vous-avez-dit-democratie-alimentaire/

(4) Sage Marne Confluence. (2020). Cadre réglementaire. Sage Marne Confluence. URL:http://www.sage-marne-confluence.fr/Qu-est-ce-qu-un-SAGE/Cadre-reglementaire

Les auteur.e.s

Eva MOREL
Diplômée de l'Université McGill et de Sciences Po Paris en politique environnementale, Eva s'intéresse au rôle et au positionnement du secteur public dans la transition écologique et solidaire, et plus particulièrement concernant la transition agricole et alimentaire.
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