Temps de lecture
2 min
Statut de la proposition
Publiée
Date de création
14/03/2021

Soutenir le développement de la comptabilité en triple capital

Pour refonder les systèmes de comptabilité sur un modèle qui intègre les capitaux financiers, naturels et sociaux : "Compter ce qui compte pour préserver ce qui est capital".

Pourquoi ?

Tous les acteurs économiques commencent à se préoccuper de leur performance extra-financière, notamment en ce qui concerne les dimensions sociales et environnementales. Des outils, labels et méthodes émergent pour mieux évaluer l’impact en matière de transition écologique et sociale mais, à ce jour, la plupart restent sectoriels. C’est en cela que la comptabilité représente un levier décisif, puisqu’elle constitue un outil partagé par tous. Pourtant, encore aujourd’hui, elle suit des normes qui ne révèlent que la performance financière des acteurs économiques, et ignorent les coûts de préservation des capitaux naturels et humains1. C’est pourquoi, nous proposons de développer la comptabilité en triple capital, basée sur le principe de préservation des capitaux naturels et sociaux, au même titre que les capitaux financiers2;3. Dans cette méthodologie, les capitaux ne sont pas substituables : la destruction d’un écosystème, par exemple, ne peut être compensée financièrement par les dons d’une fondation. Il ne s’agit pas d’attribuer une valeur à la nature, mais plutôt de financer le coût du maintien des écosystèmes. La méthode CARE (Comptabilité Adaptée au Renouvellement de l’Environnement) propose ainsi des modalités opérationnelles permettant d’appliquer les principes de cette nouvelle comptabilité écologique4. Dans les secteurs de l’agriculture et de l’alimentation en particulier, une mauvaise gestion des capitaux humains et naturels a un impact direct : perte de services écosystémiques, diminution de la fertilité des sols, manque de main d’oeuvre qualifiée et de porteurs de projets5 etc. Développer une nouvelle méthode de comptabilité est donc fondamental pour identifier et rendre compte de ces triple capitaux, indispensables à tous les acteurs de ces filières, et ainsi de redéfinir la notion de rentabilité.

Si elle constitue un véritable défi, la refonte des normes comptables est pourtant nécessaire pour réaliser la transition écologique. Aujourd’hui, la comptabilité écologique reste peu explorée et financée, freinant son utilisation à plus grande échelle6. L’application de la méthode CARE comme base de nouvelles références comptables est donc éminemment politique, c’est pourquoi nous invitons le gouvernement à s’en saisir.

Comment ?

Intervenir auprès de l’Autorité des Normes Comptables (ANC). L’ANC est le principal organisme de normalisation comptable en France. Une de ses missions est notamment d’émettre, de sa propre initiative ou à la demande du ministre chargé de l’économie et des finances « des avis et prises de position dans le cadre de la procédure d’élaboration des normes comptables internationales ». Elle est également chargée de « veiller à la coordination et à la synthèse des travaux théoriques et méthodologiques conduits en matière comptable »7.

Soutenir et encourager l’ANC à établir des prescriptions comptables qui favorisent le développement de la comptabilité écologique. L’État devrait notamment soutenir l’application de la méthode CARE dans les secteurs agricoles alimentaires. D’autre part, la normalisation comptable internationale a montré ses limites : l’ANC et le gouvernement français pourraient se positionner auprès des organismes privés comme l’IASB (International Accounting Standards Board) en faveur de ces nouvelles méthodes de comptabilité.

Faciliter le développement de la méthode CARE par un soutien plus important à la recherche. Les expérimentations, pour l’instant conduites à petite échelle et en majorité appliquées à des exploitations agricoles, permettent de perfectionner son opérationnalisation. Ainsi, la recherche de nouveaux modèles de développement permettra de faciliter sa diffusion à plus grande échelle. Des financements publics supplémentaires dans ce secteur seraient donc nécessaires.

Sources

(1) Cran, C., & Ionescu, C. (Juin 2017). La comptabilité en trois capitaux : Compter ce qui compte pour conserver ce qui est capital.
URL:http://www.compta-durable.com/wp-content/uploads/2017/11/Compta3K_Presentation-complete.pdf

(2) Le Teno, H. (M.). (Juin 2017). La comptabilité en triple capital : Le fondement des entreprises résilientes. Fermes d’Avenir. URL:https://fermesdavenir.org/wp-content/uploads/2020/05/Article-Compta-en-triple-capital-version-FR.pdf

(3) Gray, R. H. (1994). Corporate Reporting for Sustainable Development: Accounting for Sustainability in 2000AD. Environmental Values, 3(1), 17–45.
URL:https://doi.org/10.3197/096327194776679782

(4) Richard, J. (2012). Comptabilité et développement durable. Collection Gestion. Économica.

(5) Richard, J., & Rambaud, A. (2020). Développer, modéliser, promouvoir et expérimenter des comptabilités en durabilité forte, pour mettre les systèmes comptables au service d’une transition écologique.
URL:https://www.chaire-comptabilite-ecologique.fr/gouvernance?lang=fr

(6) Fermes d’Avenir. (2020). Compta d’avenir. Fermes d’Avenir.
URL:https://fermesdavenir.org/fermes-davenir/pole-influence/compta-davenir

(7) Autorité des normes comptables. (2020). Qui sommes-nous ? Missions. Autorité des normes comptables.
URL:http://www.anc.gouv.fr/cms/sites/anc/accueil/qui-sommes-nous.html

Les auteur.e.s

Laëtitia GIRAUD
En dernière année de master "Environmental Policy" à l'école d'Affaires internationales de Sciences Po, et également détentrice d'une licence de biologie, Laëtitia est particulièrement intéressée par les questions alimentaires et agricoles en lien avec la transition écologique et la justice sociale.
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